La photographie naturaliste bientôt réglementée ?
Publié le 12 Mars 2013
Pour bien comprendre ce questionnement, il est nécessaire de lire cette lettre du député Julien Aubert, un élément de réponse donné par Sébastien Beghelli, fondateur du site naturapics et ensuite la réponse de M. Aubert. Que dire ? Restant un adepte du "trop règlementer c'est déresponsabiliser", je ne suis toutefois pas contre de nouvelles lois restrictives quand elles semblent s'imposer (l'accroissement régulier de la population mondiale et la France n'y échappe pas pouvant imposer des contraintes de vie en collectivité), en sachant aussi que je souhaiterais que beaucoup soit abolies. Mais là n'est pas l'essentiel. M. Aubert se trompe sur toute la ligne. Soit il s'agit d'une méconnaissance totale, soit de la mauvaise foi pour sauvegarder un jugement partial. Pensant raisonnablement que ce monsieur ayant des responsabilité politiques possède une intelligence certaine, je ne peux que pencher pour la seconde solution. Deux points me tracassent.
- Le premier concerne le parallèle chasse/photographie naturaliste. Si le photographe naturaliste risque de recevoir une balle, n'est-ce pas la chasse qu'il faudrait réglementer. Cela voudrait-il dire que les chasseurs tirent sans voir leur cible ? Ou qu'il est autorisé de tirer sans voir où pourrait finir la course d'une balle ? Si c'est le cas, alors il faut vite légiférer sur la chasse (rappel : je ne suis pas anti-chasse primaire et j'ai des amis chasseurs). Indépendament de cela, si le photographe dérange une espèce menacée, il n'est pas interdit de faire appliquer les lois existantes concernant la protection de la nature. Ce sont deux choses totalement différentes que M. Aubert mélange afin de se justifier concernant cette proposition de réglementation. Je pense que dans notre pays, le photographe animalier respectueux qui fait un affût au sanglier au mois d'octobre (et qu'on ne vienne pas me dire que c'est une espèce menacée) devrait avoir la garantie de ne pas être tiré comme un lapin.
- Le second, plus subtil, concerne la priorité donné aux habitants du "cru". Il faut enlever les oeillères. La France c'est 550 000 km2 et 65 millions d'habitants. Allez, enlevez quelques territoires très hostiles (hautes montagnes) et pour une facilité de calcul, on peut se baser sur une densité de 100 hab/km2 soit un hectare par personne. Si cette population était répartie à peu près équitablement sur le territoire comme au Moyen-Age, où seraient nos petits coins de nature ? nos parcs régionaux, nos forêts domaniales ? Ces coins de nature existent parce que la grande majorité d'entre nous a choisi/s'est vu imposée par le mode de vie actuel (emploi/infrasctrucures) de se serrer dans les agglomérations. Des agglomération polluées, bruyantes et qui, malgré les efforts pour rendre un certain nombre d'entre elles au moins en partie agréables à vivre, insuffisamment adaptées au ressourcement. Preuve en est que les citadins ont de plus en plus le besoin de sortir de la ville les week-end et vacances. Quoi qu'il en soit, si les acteurs locaux de la campagne (agriculteurs, chasseurs, fermiers, bûcherons...) participent directement (et encore pas tous) à l'entretien de la nature (en même temps, on peut se poser une autre question : la nature a-t-elle besoin d'être entretenue à ce point ?) les autres, les citadins, participent indirectement à l'existence de cette nature par leur absence dans celle-ci une grande fraction de leur temps. Il me semble qu'en échange de cet immense service, qu'il soit souhaité ou "imposé", ils ont les mêmes droits d'en jouir que les autres sur le territoire national. De plus, cette vision de la chose me semble en adéquation avec le principe de partage et d'échange que toutes les grandes langues s'accordent à mettre en avant.
(PS : photo : chevreuil pris en mars 2010. C'est le moment pour essayer de les observer/photographier avec leurs bois recouverts de velours, avec plus que d'habitude, les précautions de non-dérangement. Les animaux sortent en effet de l'hiver, un hiver très difficile avec beaucoup de neige et ont besoin de reprendre des forces).