Publié le 6 Août 2020
Ce n'était pas le programme de départ mais avant de me coucher la veille au soir, je me décale sur le côté sans sortir de mon sac de couchage pour prendre une photo. Le matelas était protégé par un mini foot-strap mais il zippe sur le côté. En le replaçant, je le fais frotter par mégarde sur une pierre ultra saillante restée sur le côté et que j'avais négligée. "Shrick ! Pschhhhhhhh !" Trop tard. En quelques secondes il est à plat. Le constat est sans appel : la déchirure fait un centimètre de long. Je tente une réparation avec le patch fourni par Thermarest. Ca a l'air de tenir. Mais au bout de deux heures, il faut le regonfler. Nuit quasi sans dormir ; le temps de trouver un peu de sommeil, on sent déjà les cailloux sous le dos.
Dans un premier temps, je pense pouvoir continuer comme prévu jusqu'au rocher Blanc pour le deuxième bivouac, quitte à shunter un ou deux sommets pour y parvenir. En pensant pouvoir passer une autre nuit à regonfler le matelas régulièrement. Ensuite, je verrai. Et puis en "bouffant" encore du caillou, le goût n'y est plus. Cela est le coup de trop après les conditions et la petite forme. Il ne s'agit pas d'une compétition ; juste un plaisir personnel à parcourir ces montagnes un peu différemment et j'arrive déjà tant à le faire ! Cette fois-ci, il y a plusieurs signes qu'il faut savoir écouter. Je ne ferai pas le fakir une nouvelle fois. Après la traversée du passage de Clarant, me voici au col de Comberousse au soleil puis à celui de la Valloire. Le paysage y est tellement transformé par rapport aux années 80 !!! La faim me prend. Je me cale au soleil à 2800 m sur la petite arête menant à la pointe de Comberousse et me fais un repas du midi à 9h. La décision est prise de rentrer à la maison. Reste à savoir comment. A 10h30, j'entame la descente sur la Grande Valloire en faisant des photos. Lac Glacé. Magnifique ! Des bouquetins partout depuis ce matin. Je traîne. Il va commencer à faire chaud. A partir du lac Noir je peux enfin allonger un peu le pas. Je bois dans les torrents avec ma gourde filtre. Lac Blanc. Je poursuis vers le bas. Après 1800 m de descente depuis le col de la Valloire, j'arrive au Curtillard. Les jambes ne sont décidément pas au rendez-vous. Il serait toutefois intéressant de connaître le ratio effort entre 3000 m de dénivelé sur sentier et 3000 m comme je les ai faits la veille... J'attaque la remontée en face vers le col du Merdaret. Pleine chaleur mais heureusement ombragée. Je ne la connaissais pas. Le sentier est splendide. Je retrouve un petit rythme correct de 750 m/h mais sue comme un gorêt. Aux trois-quarts de la montée, juste avant de sortir définitivement de la forêt, je fais une immense pause pour essayer (en vain) de faire complètement sécher le t-shirt qui a triplé de poids. Et je mange encore.
La traversée Merdaret - Pipay, formalité en hiver avec les skis, me prend près d'une heure. Cette fois, on y est. Il fait chaud. Beaucoup trop pour moi. Je sors le joker "appel à un ami" et c'est le gentil Eric qui se colle à la récup' sur la route de Pipay. Aucun regret. Deux belles journées en montagne. Quelque part, une certaine satisfaction de ne pas être touché par ce petit échec (par rapport à l'objectif initial ; la traversée réalisée demeure déjà un beau petit périple sur deux jours). L'idée aussi que dans ma tête, je ne fais pas (plus ?) une fixation sur ce genre de choses. Pas d'entêtement. Si ça fait, ça fait. Sinon, on s'adapte. Un gros avantage aussi lorsqu'on est seul avec soi-même. Seul aussi pour décider.