Une éclaircie se dessine en fin de matinée, coïncidant avec mon après-midi de dispo. Thibaut est plus que motivé. Pour la é-niéme fois cette saison, me voici dans le secteur du col du Coq.
L'idée de départ suite aux observations d'il y a trois jours est d'aller visiter les hauts plateaux de Chartreuse et peut-être pousser jusqu'à Rocheplane en faisant un maximum de descentes versant ouest jusqu'à la limite de la forêt mais dès le départ, nous sommes surpris par la quantité de neige tombée la nuit.
Il y a 40 cm de fraîche dès le départ. Du coup, le plan hauts plateaux risque de se transformer en gros traçage. En parlant de trace, ce matin un skieur s'est octroyé le bec Charvet et Pravouta. La dent de Crolles est restée vierge et la châle commence.
Contrastes saisissants entre le vert printanier de l'étage inférieur et le blanc hivernal des pentes subalpines.
Contrastes aussi entre le blanc de la neige et le noir des nuages qui se profilent à l'horizon.
L'orage est à présent sur le Grand Som. Entre la quantité de neige à tracer, le mauvais temps qui approche d'un côté et de l'autre la perspective d'une bonne descente de la dent de Crolles à cette heure-là (13h) alors que ce n'est pas encore humidifié, le choix est vite fait.
C'est donc parti pour un nouveau pas de l'Oeille. La neige y est excellente dans le pas et une fois de plus, ça skie depuis le sommet directement dans la face.
Une fois de plus encore, je saute la barre médiane à grande vitesse, trop grande d'ailleurs car j'arrondis insuffisamment une courbe et file droit sur une petite barre de rochers affleurants. Je gère le mieux possible le passage sur le rocher et tiens debout. Dès le retour sur la neige, c'est la baignoire et l'occasion de tester le réglagé des fixations : c'est parfait, les deux skis déchaussent et je ne sens aucune douleur. On peut donc poursuivre la suite de la descente sans encombre.
Après la traversée qui passe comme une lettre à la poste, on file dans la combe ouest où le ski reste très bon.
Seule la partie inférieure est un peu collante mais avec des skis larges et un peu de vitesse, c'est nickel.
De retour à la case départ, on se dit qu'on va tricoter une nouvelle fois dans le secteur Charvet/Pravouta et on commence par ce dernier en profitant de la trace de montée présente. La météo semble s'améliorer à l'ouest.
Une fois au sommet, l'envie des hauts plateaux revient. Bon sang mais c'est bien sûr ! Il faut faire le circuit envisagé à l'envers. Avec ce qu'il est tombé, l'option zéro portage est même envisageable.
C'est donc parti pour la nord-est du Pravouta, très bonne en partie haute encore une fois. Ensuite, on suit le sentier qui descend des Ayes sur Perquelin. avec cette couche de neige humide, ça skie sans toucher, d'autant qu'il y a encore une bonne sous couche.
A 1200 m, il est tombé 30 cm de neige fraîche, reposant sur encore autant de vieille neige en terrain dégagé. Autant dire que pour un 20 avril, c'est presque exceptionnel à ces altitudes.
On remet alors les peaux pour remonter 100 m sur le chemin des sources du Guiers puis on redescend autant en versant nord jusqu'à l'intersection du sentier de la combe du Prayer.
A cette époque de l'année, le coin est désert. Malgré son problème de peaux qui l'oblige à brasser un petit quart d'heure à pied, Thibaut qui ne connaît pas l'endroit est enchanté par ce beau coin. MacGyverLio résoud le problème de peaux en haut de la combe du rocher jaune et en retour, le Thib' s'attèle à la trace.
On entre dans de la très grande Chartreuse et on va en prendre plein les yeux. La vue vers le bas n'est pas en reste non plus.
Petite mésentente et incertitude pour trouver la vire du chemin d'été. Tant pis. On passera par le haut et la cheminée du Paradis.
Le soleil est de nouveau de la partie. Quels paysages ! Et dire qu'on est fin avril. Il est tombé 60 cm de neige fraîche ici vers 1800 m cette nuit et la sonde de 2m s'enfonce entièrement sans toucher le sol.
Ce doit être la quatrième fois que je viens ici en plein hiver. Il m'est donc facile de trouver la cheminée de Paradis qui pourrait poser pas mal de problèmes dans ce sens là. Je n'ai jamais vu le coin autant chargé en neige. Ca a collé de partout.
Les grimpeurs vont s'abstenir encore un peu avant d'aller aux rochers du Midi qui ruissellent.
On arrive même à descendre en peaux dans le paquet de neige fraîche la petite pente à 45° qui amène à la cheminée.
La voici. Le passage est étroit (la neige avait dû y fondre entièrement avec la canicule de mars) car la faille en elle-même n'est pas très remplie mais il suffit de se laisser glisser dedans.
On poursuit vers les rochers du Midi. Malgré l'heure (16h) et surtout la date, la neige est toujours froide dans cette pente orientée nord-ouest.
Une fois sur la crête, le contraste est saisissant avec le vers des Petites Roches.
Une crête panoramique à souhait. Des arbres plâtrés.
Tout ça au-dessus des vertes vallées. Merci pour cette belle éclaircie au sommet.
Au loin, le plateau incliné de la dent de Crolles qui sera la dernière remontée du jour et la (presque) fin de ce circuit de 2200 m de dénivelé et de grosse trace.
Mais auparavant, on ne résiste pas à une belle descente poudreuse jusqu'à la limite des barres du Guiers. Un vrai régal. Et toujours pas une seule trace dans ce coin immaculé.
Ca ne va pas durer très longtemps. L'avantage/inconvénient des skis larges. Mais même Thibaut se fait plaisir avec ses Sintesi.
Un coup d'œil dans le rétro durant l'ultime remontée vers le sommet de la Dent : le blanc contraste encore avec le noir du ciel.
Aujourd'hui, on en aura pris plein les yeux ; vraiment.
La Croix est en vue. Le ciel reste baché mais la visibilité est bonne.
On croisera dans le pas de l'Œille à la descente les premiers bipèdes du jour : deux piétons qui brassent dans l'objectif de décoler du sommet de deux skieurs qui montent le soir. Plus bas, alors que Thibaut saute la barre médiane, on aperçoit deux points qui montent aussi. C'est Jo et Pascal qui viennent se faire une dent du soir. Mince, je ne suis pas le dernier skieur de la saison ici. Va falloir y revenir encore !