Publié le 15 Février 2021
On attaque la onzième semaine de ski de ce bel hiver. Si on excepte la parenthèse automnale (fin septembre -> fin octobre, parenthèse remarquable et qui m'aura fait faire deux jolies sorties, sans que toutefois la motivation soit suffisante pour délaisser si tôt les autres activités) on arrive déjà à une quarantaine d'itinéraires sous les semelles. Il est peu probable que ce rythme perdure jusqu'en juin comme c'était le cas au début des années 2000 car d'abord la neige transformée me motive moins (je la trouve un peu "ennuyeuse") mais surtout, l'envie de changer d'activité se fait sentir dès le mois d'avril.
En attendant, les conditions demeurant exceptionnelles en montagne, me voilà reparti avec Henri-Luc en direction de la vallée du Haut-Bréda. Cette fois, on partira de Fond-de-France et on profitera de la trace de montée jusqu'au lac Noir, faite par ceux qui réalisent le col du Mouchillon en aller-retour. Merci donc aux premiers traceurs même s'ils se sont un peu fourvoyés dans les bouleaux (au lieu de rester franchement rive droite au niveau du sentier des Deux Ruisseaux) sous Pendet.
Une fois au lac, il faut se coltiner la trace. Mais ce genre de trace, je me la coltine tous les jours ! Une trace dans une neige parfaite, poudreuse impalpable sur trente à quarante centimètres et ce, jusqu'à cent mètres du sommet des Cabottes. On retrouve un peu le travail du vent dans les derniers mètres qui se terminent sur une arête aérienne. Mon idée de départ était de faire l'aller-retour mais non sans jeter un oeil au couloir en S. Durant la montée, je sens que mon acolyte est surtout motivé par la perspective du couloir...
Sommet. Ambiance haute montagne. Au loin, des randonneurs sur Belle Etoile, Mouchillon, Pouta etc. Toujours personne ici depuis le départ. Le couloir en S a l'air bon et nous tend les bras. Malheureusement, cinq skieurs l'ont descendu la veille et la partie (un peu) étroite du haut est complètement ravagée. Je ne suis pas surpris quand on voit l'engouement de cette activité ces dernières années et avec un nouveau bond en avant cet hiver (cause stations fermées) ; en revanche, ce qui nous surprend, c'est de voir que le groupe aura remonté en crampons l'intégralité du couloir. Entre le confort (montée intégrale à l'ombre, brassage à pied) et la sécurité (gros paquets de neige en équilibre et surtout, risque que des skieurs arrivent par en-haut comme c'est très souvent le cas ici, et purgent sur les piétons), l'idée n'est vraiment pas bonne. Il y a les pentes qu'il est conseillé de remonter mais il en est d'autres qui ne s'y prêtent pas du tout, justement par le fait qu'elles réservent un accès facile de l'autre côté. Si c'est bien rentré dans les moeurs pour l'Infernet, ce n'est pas encore le cas pour le couloir en S.
Détestant skier une pente déjà tracée, Henri-Luc nous dégotte une variante de premier ordre : elle commence par des virages aériens sur l'arête qui sépare le S de la face ouest puis plonge dans un couloir parallèle au S, un peu plus raide, notamment de par son entrée à peut-être 55 degrés. La suite est rando avec une telle qualité de neige. On rejoint le S à mi-hauteur mais en utilisant les contre-pentes, sans être gênés par les traces. Au bas du couloir, c'est Bibi qui reprend les rennes de l'itinéraires. Surtout ne pas suivre les traces : tirer main droite dans des vallonnements à hurler comme un chien(-loup) puis, vers 2000 m, trouver une agréable banquette qui ramène à droite dans la combe de Pendet. Encore des hurlements jusqu'au fond de la vallée, complètement déboisée par les avalanches. Et toujours une neige exceptionnelle. Quelle ligne depuis le sommet ! Et dès qu'on tombe sur une section qui a pris le vent, hop, une courte traversée et on va retrouver la poudre. Pas bien le temps de prendre des photos. On termine par quelques acrobaties pour franchir cinq ou six torrents skis aux pieds sur des cuchons de neige puis par la "piste" de fond de vallée qui longe le torrent du Pleynet jusqu'à la voiture. Près de 1700 m de descente d'une seule traite dont 1300 m de très grand ski : on ne trouve pas ça tous les jours, même dans le plus beau des massifs à skier !
De par l'esthétique de la ligne et la qualité de la neige (même si ce dernier point est devenu LA marque de fabrique de cette saison), assurément ma plus belle sortie de cet hiver.