Encore une météo de merde. Pas de chance pour Mat qui avait choisi ce samedi pour convier tous ses amis à fêter son passage chez les quadras. Cela pour dire que : samedi = pas dispo ; dimanche = lever tardif suite aux festivités de la veille. Pas envie de faire de la voiture, d'autant que le véhicule principal doit éviter de rouler jusqu'à mardi pour cause de plaquettes de frein réduites à néant.
L'idée est donc d'attendre une fois de plus l'éclaircie (qui une fois de plus ne viendra jamais) pour aller à la dent de Crolles. Encore ? Disons, que c'est un sommet que j'aime, que c'est à côté de la maison et puis, je tenais à m'y rendre à cette date. Pourquoi ? Pour comparer avec un autre bel hiver : 1998-99. Il y a quatorze ans donc, de paquets de neige tombaient dès septembre (80 cm mi-septembre au refuge de la Perrière - 1800 m en Belledonne) puis en octobre et novembre pour culminer en février. On se souviendra de ce mois célèbre par ses quantités de neige astronomiques dans les Alpes du nord (jusqu'à 277 cm au Margeriaz dans les Bauges) et plus tristement par l'avalanche qui causa la mort d'une dizaine de personnes dans les chalets du Tour.
Cette année-là donc, très précisément le 1 juin 1999, je réalisais ma première dent de Crolles. C'était en compagnie de Nico (Cardin) après l'ascension du pilier Sud. Je me souviens pour cette première Dent qu'il ne restait que deux petits névés sur le plateau sommital au niveau du collu de l'Oeille, dans les talwegs bien prononcés. Lors de cet hiver supérieur à la moyenne donc en enneigement, la totalité de la Dent de Crolles était sèche à de rares petites anomalies près. Il était intéressant de comparer avec aujourd'hui. Plutôt que d'aller faire un footing dans le brouillard, autant se faire une dent (dans le brouillard aussi).. Et comme j'imagine bien qu'il y reste de la neige, était-ce si débile d'emporter les skis, surtout avec le matos ultra light d'aujourd'hui ? Au pire, j'aurais emporté quatre kilos pour rien. Combien de fois ai-je transporté un poids similaire pour aller faire de la photo animalière en rentrant bredouille ?
Et puis avec un coupe-vent, 50 cl d'eau, une paire de peaux, une paire de gants, un bonnet, les Dynastar PDG montés en Plum et les TLT5, on se sent finalement comme si on allait faire une petite rando avec les enfants. Voire même plus léger. Alors c'est parti.
Dès le départ, c'est glauque (deux voitures seulement à 17h au parking pour un dimanche de printemps) et ça le restera du début à la fin. Au col des Ayes, la neige est encore bien présente en nord. Je serais curieux de savoir jusqu'à quelle altitude on pourrait encore la trouver. Au-dessus ça monte en baskets jusque sous l'Oeille où je les dépose et chausse les TLT5. Sommet dans le brouillard complet mais pas trop froid malgré le vent du nord.
Inutilr de s'attarder. Je chausse et descends versant nord sur les hauts plateaux. Il y a encore 50 à 120 cm de neige selon la configuration du terrain et ce, en continue. C'est vraiment exceptionnel. L'avance (ou le retard) sur 1999 n'est pas seulement de quelques jours. Il est montrueux ! 300 m de ski et des traces de marmottes plus loin, je remets les peaux et remonte au sommet.
Malgré l'absence de visibilité, on y ressent une certaine sérenité. Ici on est bien, loin de tout.
Il faut faire attentionde ne pas se mettre dans un des trous qui se creusent avec la fonte des neige car il y a vraiment moyen de se faire mal. J'ai aussi entrevu quelques sciallets qui ne font pas rire.
Deuxième sommet. Cette fois, il n'y a plus qu'à rentrer par le pas de l'Oeille. 100 m de ski continu jusque sous l'Oeille, 50 m de déchaussage puis 50 m de ski pour sortir du Pas.
La traversée est sèche mais je la fais en légère montée pour gagner le haut du talweg ouest encore bien enneigé. Une petite interruption plus tard je déchausse définitivement à 1600 m. Pour une face sud-ouest, on ne va pas trop en demander. Malgré une neige sale, un brouillard omniprésent, je préfère être là en ski qu'en baskets. Les virages, bien que ce soit court et hâché, sont fort agréables. C'est franchement pas plus débile d'être là en skis qu'à pied. La vraie question est : fallait-il venir ici par ces conditions météo ? Entre ça et rester à la maison, le choix fut vite fait et puis, c'est quand même pas tout les ans qu'on skie en juin à la Dent. Validé ou pas ? A chacun de se faire son opinion. L'essentiel est ailleurs. Une prise de repères à l'issue de cet hiver atypique.
Dénivelé total effectué : 960 m. Dénivelé total skié : 600 m (en deux fois, une première descente de 300 m continue, et une seconde avec 300 m de ski également mais en quatre morceaux).