Des conditions carrément printanières au coeur de l'hiver. Il faut impérativement viser la neige transformée d'autant qu'il a plu jusqu'à 2500 mètres laissant généralement une croûte glacée dangereuse dans les versants ombragés. L'avantage de cette situation, c'est que le timing n'est pas pressant : même dans l'après-midi, les versants est/sud-est ne pourrissent pas jusqu'au fond du fait d'un soleil encore bas sur l'horizon. En revanche, pour les versants ouest, il faudra attendre assez tard pour éviter la neige dure, d'autant que dans nos massifs dauphinois, les pentes étant très tracées, il n'y a rien de plus désagréable que de skier de la neige dure sur les reliefs des traces regelées. Ca peut rester agréable sur une surface lisse (avec les précautions d'usage concernant la sécurité) mais là...
La chaîne de Belledonne, paradis du ski, possède un inconvénient déjà abordé sur ce blog : la quasi absence de faces sud. Hormis le jas des Lièvres, les (rares) autres faces sud (Grands Moulins, Grand Miceau, Botte, pic du Loup) sont soit minoritairement sud (avec le reste en versant froid donc), soit nécessitent du portage ou beaucoup de dénivelé.
Les filles n'ayant encore jamais foulé le sommet de ce grand panneau blanc qu'elles voient depuis leur fenêtre, nous iront au Jas. Au choix, 1000 m de dénivelé depuis la Betta ou un enchaînement "petites montées - grand ski" au départ de Prapoutel. Nous choisissons cette seconde option grâce au forfait randonneur de la station des Sept-Laux. Cela fera travailler les manips. Cet enchaînement s'est avéré parfait et très instructif pour elle. En voici le cheminement.
1- Montée à la cime de la Jasse depuis l'arrivée du TSD Gypaète (alpi : PD). Crampons obligatoire (très bonne trace).
2- Dent Blanche de Bédina après une première courte descente. Au choix au plus court ou en skiant un peu plus bas (jusqu'au replat 2250). En cherchant les reliefs sud-est, ça commençait déjà à transformer un peu à 10h30. Puis remontée au sommet.
3- Face sud-est de la dent Blanche. Transformée excellente à 11h. Nombreuses pentes possibles ; nous avons choisi la plus lisse (quasi pas de trace), un peu au sud du sommet. Attention, le haut est raide et exposé (ski : 3.3). En gardant main droite, on trouve de la neige peu trafolée pour du ski excellent. On peut descendre jusqu'au habert d'Aiguebelle ou s'arrêter un peu où on veut entre 1700 et 1900 m. Pause pique-nique/farniente pour nous car la descente du Jas (face sud ouverte à l'ouest) doit dégeler tranquillement.
4- Montée au jas des Lièvres par la combe sud-est. Le haut est raide ; avons fini les 50 derniers mètres du couloir à pied même si ça passait ce jour à skis (bien ramolli vers 13h).
5- Descente de la face sud en grandes courbes (moquette excellente). On termine limite limite (quelques passages dry) à la piste forestière au niveau de l'angle ouest. On suit cette piste jusqu'à la colonie du pré de l'Arc.
6- Remontée (à pied) jusqu'au Gros Caillou.
7- Descente jusqu'a Prapoutel en rejoignant les pistes de ski pour finir. D+/D- : 800/2200. Un superbe circuit sans recouper sa trace. 9 manips : de la peau, de la marche, du cramponnage et du très bon ski...
Bien sûr, de telles conditions sont inquiétantes et leur répétition de plus en plus régulière témoigne du changement climatique. Pour autant, le voile majoritairement présent jusqu'à vendredi a permis de sauver la mise. Bien sûr, des massifs comme les Bauges, le Vercors ou la Chartreuse sont quasi out (portage obligatoire et très peu d'itinéraires skiables) mais la neige se maintient à 1300-1500 mètres en versants ombragés. Et le changement de temps annoncé en milieu de semaine pourrait redonner un caractère hivernale à la montagne. En attendant, à nous de nous adapter et de trouver les bonnes solutions pour profiter de ce que la montagne nous offre.