Traversée de Belledonne, J2
Publié le 7 Juillet 2013
Derniers regards à travers la fenêtre du refuge. Il va falloir y aller. Les jambes sont lourdes mais la motivation est intacte.
Dans la montée au rocher Blanc, le ton est donné. Malgré l'isotherme 0°C à 4500 m, le regel est béton. J'avais pris soin de noter que le regel par nuit clair est effectif jusque 1500 m en-dessous de l'isotherme 0°C. On n'aurait donc dû n'avoir qu'un faible regel à 3000 m. En réalité, c'est béton dès le départ. Nous sommes inquiets (surtout moi) pour le col de l'Amiante et les derniers 50 m raides.
Je tente de monter le plus haut possible en skis mais la pente est trop raide, la neige est trop dure. Je stoppe. Thibaut, plus prudent et d'un toucher de neige sans doute un peu moins bon que le mien sur les skis, a déjà choisi de monter dans les rochers. Je lui dit qu'en tapant du pied dans la neige, ça devrait le faire, piolet à la main.
Et là, les rôles s'inversent. Thibaut en bon alpiniste est à l'aise ; de mon côté, je suis un peu taquet sur une portion où les semelles ne touchent la neige que sur 2 ou 3 cm. Thibaut, avec une belle élégance, se sacrifie pour tailler quelques marches et on passera comme ça. Le piolet aura été indispensable pour ces 50 m. On aura remarqué sur la photo un très bel exemple à suivre en cas de glissade : les bras nus :((
L'"escalade" finale est splendide avec le soleil qui nous cueille.
Face à la pyramide.
Premier sommet de la journée. Le culmen de la journée, mais aussi de toute la traversée, dépassant la Croix de deux petits mètres.
La neige est encore un peu dure dans la descente mais rien de catastrophique.
De toutes façons, faut avancer. A 2100 m sous la Marmotane, on refait le plein d'eau (déjà !) et on attaque la montée au Tepey. A pied sur 150 m déneigés au départ puis on chausse sur la pente sud vers 2250 m.
Ca monte, ça monte. Derrière le rocher Blanc, skiable encore un bon moment !
Petit coup d'oeil au rocher d'Arguille. On aurait pu le gravir mais les petits couloirs est sont déneigés et on est là pour faire du ski.
Premier grand col de la journée. Il y en aura d'autres.
Côté Maurienne, la descente est à point.
Le second grand col de la journée est en vue, la selle du puy Gris (et le Puy à sa droite, magnifique triangle rocheux)
La montée est raide ; en fait, on se trompe de vallon ce qui nous vaudra 100 m de redescente. Il fait chaud ; on n'avait pas besoin de ça. Gros coup de bambou pour ma part. La chaleur, la fatigue de la veille, un foncier sans doute un peu moins bon qu'il y a deux ou trois ans... N'ayons pas peur de le dire, nous sortons l'élastique, Thibaut devant. Et ça change tout. Pourtant, je n'ai pas l'impression de vraiment en profiter mais il s'opère sûrement quelque chose de psychologique et j'avance à nouveau à un rythme correct.
Selle du puy Gris. Le chapeau est sorti. On est aussi obligé de passer en mode crème solaire bien que j'en ai une sainte horreur.
Une courte descente nous amène à proximité du col de Comberousse.
Nous avons en effet décidé de se payer le sommet de la pointe homonyme afin de skier la face nord-est. On aura pris soin de noter que l'enneigement exceptionnel de cet été est bien loin de combler le manque glaciaire par rapport aux années 80. Voyez ici...
Nous gravissons la pointe par son arête est. Tiens je ne l'avais jamais faite celle-là. C'est assez alpin et bien pourri comme souvent dans le coin. Mais c'est du terrain que je connais bien et m'y sens à l'aise. Un ressaut un peu plus costaud nous oblige à un contournement par le nord, les pieds sur une pente de neige fort raide.
Ca c'est fait. La vue se dégage sur le prochain col : le col Morétan.
On fait un peu plus plus la grimace mais le jus est revenu en ce qui me concerne. Thibaut reste en forme et très régulier.
Coup d'oeil au sud-ouest sur les Trois Laux. Bien blanc aussi. Au fond, les vallons du Pra sans doute skiables jusqu'en août cette année sauf canicule continue.
La descente de la face nord-est est une formalité avec toutefois trois virages fort raides en haut qu'il vaut mieux ne pas rater (surtout en t-shirt, sans gants... les guignols...). Ce sera la plus sérieuse de la traversée.
En montant au Morétan, Comberousse dans le rétro. Remarquer l'écrasante domination de l'enneigement par rapport à l'année dernière qui n'était pas mauvaise et en même temps le côté rocheux de la face par rapport aux années 80...
Le col est vite avalé. Je n'aurais pas cru reprendre du poil de la bête. Mais on sent bien que ça commence à tirer et la chaleur est accablante.
Descente fantastique sur les lacs.
Les cumulus espérés trainent pour nous faire de l'ombre en remontant au col du Pertuis. On suffoque mais ça déroule.
Il est temps que ça se termine ; la photo du "sommet" est floue.
Le brouillard espéré vient nous emm... dans le début de la descente du col du Pertuis. A 2365 m ce sera le col/sommet le plus bas de la traversée. On pourrait imaginer que la descente soit la plus courte.
Il n'en est rien. Balayé par de redoutables avalanches de printemps, le Pertuis reste normalement skiable à 1500 m fin mai/début juin.
Cette année, ce sera un 7 juillet. Plus de 800 m de ski continu dans ce couloir. Certes c'est un peu sale, surtout vers le bas mais en faisant attention, ça passe sans skis cailloux car les pierres sont des pierres "posées" sur la neige et qui bougent avec le virage. Quant aux branches et autres saletées, elles altèrent la glisse mais pas le matos.
Il serait bien toutefois que des passages viennent l'entretenir, qui sait qu'il soit skiable d'ici un mois !!!
Guère plus de 400 m de dénivelé en basket pour finir à Gleyzin où Mélanie vient nous chercher. Un grand merci à elle.
Les chiffres du jour : 2900 m de montée ; 3900 de descente dont 3500 m skiés.
Sur deux jours : 6500 m de montée ; 7100 m de descente ; 6400 m de ski. Ratio ski/marche = 90%.
Pour tous les deux, cela restera un beau voyage et une belle réussite même si on aurait pu être plus ambitieux en finissant aux Grands Moulins. Mais pas sûr qu'on aurait tenu alors on ne regrette pas le beau final du Pertuis. Et on n'en a pris plein les yeux. Merci Belle Donne !!!