Une Botte de plus
Publié le 14 Août 2019
Aujourd'hui, ce sera journée escalade. Je propose aux filles de retourner sur la Botte, ce petit sommet tout près de la croix de Chamrousse où elles ont fait leur plus belle randonnée à skis l'hiver dernier. Une fois de plus, en arrivant sur le secteur, on se rend compte du contraste entre la foule de la croix de Chamrousse, des lacs Robert, du sentier venant des lacs Achard ou de celui allant au col des Lessines et le calme qui règne autour de ce sommet. Et ce n'est pas faute de le répéter. Qu'est-ce qui fait que cette montagne soit tant boudée ? A mon sens la méconnaissance.
Une cordée féminine est toutefois à l'attaque juste avant nous. Nous prenons le temps pour nous équiper. La première partie de la face nord-est présente plusieurs lignes et on a le choix pour gagner les vires médianes. Pour nous, ce sera "coup de froid", deux belles longueurs en dalle (4c). Les filles y découvriront toute la différence entre les 5c verticaux sur résine et les voies supposées plus faciles mais où c'est "tout sur les pieds". Du coup ça ne va pas très vite mais comme l'autre cordée ne va pas vite non plus, on décide de faire la pause méridienne sur la vire.
Une fois tout le monde ravitaillé, on repart et on rejoint la cordée qui peine vraiment à trouver la ligne. C'est l'occasion de passer un message à l'ouvreur, Xavier Dorel, qui, dans les années 90-2000, a ouvert (toujours en bon style, depuis le bas), plusieurs voies dans le secteur Belledonne / Grandes Rousses (entre autres). Le dénominateur commun de ces voies est leur facilité au niveau du chiffre (6b maximum et en général dans le 4-5). On notera "spitophobie..." au Galeteau, les voies du Barrioz (col de la croix de Fer), l'Evêque (fond de France), "coup de chaud" (pic du Pin)... mais aussi l'équipement aéré. L'idée de Xavier, sauf erreur de ma part, était de mettre un minimum de plaquettes de manière intelligente : protéger les crux mais laisser la possibilité de mettre des coinceurs et des sangles là où c'est possible, et laisser un peu engager dans les passages les plus faciles.
Cette façon de faire, qui était monnaie courante au siècle dernier, est à réfléchir aujourd'hui. Qu'il y ait des lignes de type trad où ça engage, oui ! Et il faut à tout prix les conserver. De même les voies de type mixte : une plaquette quand on ne peut rien mettre d'autre et qu'il y a une certaine difficulté. Mais dans ce cas de la Botte, on se situe dans des voies faciles (5a/b max pour nous), donc intéressantes pour des débutants. Pour qu'ils apprennent la grande voie. Or, les arbres ne sont pas toujours suffisants pour rajouter des sangles et souvent, il n'y a pas de quoi mettre des coinceurs facilement dans le gneiss exigeant. En voyant la cordée nous précédant en difficulté, j'en ai pris la mesure. En voyant mes filles avoir peur dans de petits pas en traversée avec la corde sur le côté également. En évitant de clipper certaines plaquettes (déjà qu'il n'y en avait pas beaucoup) parce que les filles allaient avoir du mal à les enlever, encore.
Du coup, je me pose une question : pour redonner un intérêt au site (les voies sont quand même peu fréquentées) et profiter de ce terrain a priori facile, ne serait-il pas judicieux de revoir cet équipement ?
Pour la suite, nous avons terminé la voie avec des filles plus à l'aise dans le raide (et un tantinet aérien) crux sommital plongé dans l'ombre (orientation et heure obligent) que dans les dalles couchées du départ les pieds à plat, avons rejoint le sommet une nouvelle fois donc (voir supra) puis regagné la foule à la Croix pour une descente en télécabine. Car nous étions bien là pour grimper. Et le papa, déjà pas très fan des descentes, n'était pas plus emballé que sa progéniture à rejoindre le bercail par les pistes avec tout le matos sur le dos. Autant faire travailler la station.