Sylvain Thiabaud
Publié le 1 Juillet 2025
Je voulais vous parler un instant de Sylvain Thiabaud. Guide et prof d'EPS à la fac de Grenoble, originaire de Maurienne, Sylvain est un passionné d'escalade, rocheuse, mixte ou glaciaire, avec un penchant pour l'ouverture de voies nouvelles. Grimpeur de haut niveau, il a de grandes classiques dans sa besace dont une des rares répétition de "Divine Providence" en libre au Grand Pilier d'Angle.
Exilé dans le sud-ouest pour le boulot, Sylvain a sévit sur les falaises des Pyrénées avant de revenir dans les Alpes tout près de Grenoble. Depuis, il a fait des rochers du Midi, de la dent de Crolles, de Chamrousse, du Grand Pic de Belledonne,... son jardin d'exploration. Des lignes nouvelles viennent s'intercaler entre les (plus ou moins) classiques sur ces sites renommés. Des voies parfois entièrement équipées mais surtout, des itinéraires dits de trad' sur lesquels Sylvain sait trouver le difficile équilibre entre protections naturelles et plaquettes.
Je décrie de plus en plus les réseaux sociaux sans pour autant les snober ; c'est grâce à ces moyens de communication que j'ai pu faire de nombreuses rencontres et partager ma passion. C'est ainsi que j'ai commencé à échanger avec Sylvain, un peu avant son arrivée à Grenoble. Un certain nombre de points en commun nous ont fait nous rapprocher mais avec quand même un fossé entre nous deux. Là où j'atteins mes limites lorsque je grimpe régulièrement (le "7inf"), lui, il randonne pour ne pas dire, il s'échauffe.
A force d'échanger, nous tenions à partager une sortie ensemble. Sylvain me propose une petite ouverture "à mon niveau" en face ouest de la dent de Crolles, the place to be par ces temps de canicule. Comme l'a dit Josiane Balasko, j'y vais mais j'ai peur. Ce qui a été pressenti comme une voie Tabaud devrait plutôt être une voie Thiassan ! J'avais entièrement confiance en le choix du bonhomme mais parfois, les mythes sont difficiles à dépasser. Dès le départ, je suis habité d'un petit stress bridant. Il me faut parvenir au R2 pour avoir la confirmation qu'il faudrait forcément passer par un petit moment de panique.
Sylvain attaque cette fissure en traversée. Une longueur de rêve, plein gaz, les mains plus ou moins bonnes mais les pieds à plat sur ce gris pas forcément très adhérant du secteur. Le Mauriennais est un expert dans la pose de friend. La couleur rapidement identifiée, un petit coup de marteau pour arrondir quelques picots de carbonate de calcium et hop, l'objet est en place. Parfois, il s'y reprend à deux fois pour bien le positionner. Quelques à-coups dessus afin de s'assurer de la tenue et la corde est clippée. Sylvain avance, place un puis deux autres friends. Au relais, la tension monte. Il va falloir traverser en second (le pire !), proche de mon niveau max, avec la peur de déboutonner un friend. Ouf, il pose une plaquette en quatrième point. Un crochet placé en un éclair, une petite consigne à l'assureur "gaffe, le crochet est pas top !" et la manœuvre est exécutée avec brio. Quatre points fixes seront posés jusqu'au relais.
Derrière, je survis autant que faire se peut et termine vivant au relais. Sylvain rigole. Une autre traversée, plus facile, suivie d'une belle dernière longueur en fissure nous mènent au sommet où deux rappels nous permettent de revenir sur le sangle de la Barrère. La longueur clé (peut-être 7a, peut-être pas...) aura été le témoin du fossé qu'il y a entre mon niveau d'escalade et le sien. Mais l'essentiel était ailleurs. Les montagnes peuvent rapprocher les gens. L'entraide, le partage, l'adaptation... ont été le vocabulaire associé à la sortie de cette belle journée au frais. Quasi formalité pour Sylvain, je suis certain qu'il aura pris autant de plaisir à m'y guider que moi à le suivre. Un grand merci pour ce partage l'ami !
PS : et l'humour en plus. Sylvain propose de nommer cette voie (topo plus tard) "la traversée tassanique". Validé !