Fin de partie
Publié le 26 Janvier 2021
Depuis le jour de Noël soit très exactement depuis un mois, nous bénéficions sur les Alpes du nord de conditions exceptionnelles pour le ski. Le mot exceptionnel ne signifie pas que les quantités de neige dépassent les records ; ni même que le soleil règne en maître. Non, l'exceptionnel est à prendre en compte pour la qualité de la neige proportionnellement à l'espace disponible. En effet, nous avons reçu des chutes de neige régulières, souvent modestes (de 15 à 30 cm, parfois davantage) mais assez nombreuses, permettant d'effacer les anciennes traces (je considère la neige "trafollée" comme médiocre à skier) tout en améliorant peu à peu l'épaisseur et donc diminuant du même coup le risque de touchettes. Et cette situation s'est produite au moment où le soleil est au plus bas de l'année, avec des températures conformes aux normales, ce qui a permis de conserver de la poudreuse quelle que soit l'orientation de la pente. En ce sens, tous les itinéraires suffisamment enneigés promettaient du très bon ski. Pour s'en convaincre, il suffit de revoir sur ces pages la (grosse) vingtaine de sorties glisse effectuée durant cette période... Il était inutile d'être un expert pour trouver de la bonne neige.
Etat des lieux
Pour une fin janvier, l'enneigement est excédentaire sur les Alpes du nord, assez uniforme à partir de 1500 m du Vercors au Léman. Comme en témoigne cette image prise sur le site meteofrance pour le massif de Belledonne (ci-dessous à gauche), il est largement excédentaire en moyenne montagne (et encore plus sur les Savoie vers 1000 m) et plutôt conforme aux normales en altitude. Cela reflète bien des précipitations non exceptionnelles en terme de quantité mais accompagnées de froid pour les conserver à basse altitude. Pour les Alpes du sud, le froid a également permis la conservation de la neige en bas et donc, un enneigement un peu supérieur à la moyenne à 1500 m. En revanche, il est déficitaire en altitude faute de perturbations méditerranéennes d'ampleur suffisantes. Ci-dessous (à droite), le croquis pour l'Embrunais - Parpaillon. A noter qu'habituellement, si l'écart Alpes du nord / Alpes du sud est presque systématiquement marqué en faveur des premières en-dessous de 2000 m (ce qui se vérifie nettement encore cette année), cette règle l'est beaucoup moins en altitude où cela dépend des saisons. Et cette année, l'écart est particulièrement marqué (de l'ordre de 3/1 pour le nord).
Fin de partie
Cette situation remarquable pour le skieur est désormais terminée. On pourrait rêver d'un hiver de quatre ou cinq mois comme cela mais... il ne faut pas rêver. Les prévisions à quinze jours montrent un changement de temps. On note sur le modèle de la Clusaz (Haute Savoie, 1200 m d'altitude - copie d'écran du site meteoblue) que les perturbations douces vont s'enchaîner. Avec un anticyclone positionné sur les Açores et prolongeant une sorte de dorsale sur l'Espagne, on entre en effet dans une situation typique du régime d'ouest, pouvant parfois être assez doux ce qui semble être le cas.
Conséquences
Outre un temps perturbé, peu propice aux sorties contemplatives en altitude, il faut s'attendre à une dégradation globale des conditions :
- Probablement partout en-dessous de 1500 m avec, au mieux, une neige mouillée, au pire un déluge. L'Isère sera (et le Vercors en tête de liste), comme d'habitude dans ce cas, en première ligne de la dégradation. Le Beaufortain, la haute vallée de l'Arve (le Tour) et la Tarentaise pourraient résister. Mais combien de temps ?
- Des accumulations importantes au-dessus de 1500 (pour les secteurs les plus favorables) et 2000 m plus à l'ouest, faisant que le cumul deviendra excédentaire pour la saison, et le risque d'avalanche provisoirement très élevé.
- Espoir ? Ces situations d'ouest qui s'enchaînent font souvent le yoyo et on peut espérer que l'alternance de l'isotherme zéro degré permette de conserver une limite basse de la neige (pour le skieur) tout à fait correcte. En outre, étant données les quantités en place, la neige ne disparaitra pas du jour au lendemain même s'il pleut en continu (enfin, on espère ne pas revivre une situation comme en février 1990...). En fin de période, il est fréquent que cela se termine par un basculement du flux au nord-ouest abaissant la limite pluie-neige et surmontant la couche neigeuse fortement humidifiée par plusieurs centimètres de poudreuse permettant du bon ski.
En attendant d'y voir plus clair, on se repasse le film de ces derniers jours de ski, secteur Belledonne, fiefs du Collet et du Barioz où j'aurai encore réussi à découvrir de nouvelles sections dans des forêts très bien enneigées !