Publié le 7 Juin 2024
Nous voici entrés dans l'été météorologique ; c'est le moment de faire le bilan de cet hiver 2024 plutôt atypique. Sans entrer dans les détails, voici les grandes lignes de cet hiver.
- Un enneigement minimal en moyenne montagne. Moins pire que l'année précédente durant laquelle je n'avais pas du tout skié en Chartreuse mais des redoux plus nombreux ayant eu raison dès fin janvier de la neige tombée en basse montagne durant le mois.
- Une pluviométrie excédentaire : déjà + 6% sur la moyenne de la saison glissante et il manque encore trois mois...
- Un printemps remarquablement frais et humide. Ce qui n'est pas sans rappeler 2013 et 2001. En 2001 et 2013, l'excédent était tel qu'on skiait encore à 1800 m à la fin juin dans les Ecrins et en Belledonne. Cependant, en altitude (disons, à partir de 2200-2500 m selon les massifs), 2024 se hisse parmi les meilleures années (probablement dans le top 5) de ces trente dernières années.
En fouillant dans les archives, on note les hauteurs de neige suivantes au 7 juin :
- Aigleton 2240 m (Belledonne) : 2013 = 250 cm ; 2024 = 120 cm (pas de relevé pour 2001)
- Bonnepierre 2970 m (Ecrins) : 2001 = 380 cm ; 2013 = 2024 = 340 cm
Sur un autre critère, cette même balise de Bonnepierre n'est passée à zéro que trois fois durant les trente dernières années : 2001 (19 août) ; 2013 (7 août) ; 1994 (5 août)
Il en ressort bien que 2024 est un excellent cru pour la neige en haute montagne (au-dessus de 2300 m) ; un hiver normal entre 1800 et 2000 m et déficitaire en-dessous. Atypique on vous dit.
A noter une autre évolution entre 2001 et 2024. A l'époque (2000-2006), avec un niveau de ski plus limité, du matériel plus lourd et moins performant et des informations beaucoup plus parcellaires, nous skiions prudemment les couloirs mythiques des années 70-80 (Infernet, Sabre, Bérarde...) et passions pour des illuminés malgré nos virages sautés parfois peu esthétiques. Et quand nous en faisions deux dans la journée c'était un petit exploit. Aujourd'hui, quand elles sont en conditions, des dizaines de skieurs les dévalent à coup de grandes courbes. Et là où nos yeux ne se posaient même pas (Ailefroides...), et c'est pas faute de les avoir eu grands ouverts et d'avoir réalisé des topos, ça skie aujourd'hui de manière fort élégante.
Dix ans plus tard soit à la fin de la première décade des années 2010, nous considérions les enchaînements à la journée des regrettés Nicolas Wirsching et Stéphane Brosse (plusieurs fois 3 à 4 couloirs en 5.1-5.3 pour 4000 de dénivelé) comme les plus belles réalisations. C'était l'avenir du ski de pente.
Aujourd'hui, nous en sommes totalement convaincus avec le mois de mai remarquable du duo Jean-Védrines, totalisant parfois jusqu'à 6000 mètres de dénivelé dont plus de la moitié de pentes raides. L'apothéose sur la Meije :
- Agneaux par les 5 faces (Davin 4.3/Est 5.2/Sud 4.3/Directe 5.2/Calotte 5.1) (au mois de février)
- Epéna nord à vue (première répétition 5.4-5.5)
- Trilogie du Diable (pic Maître 5.4/Diable 5.4/Ange 5.4)
- Pic Sans Nom nord (5.5) + Ailefroide centrale (5.4-5.5)
- Ailefroide orientale nord (5.5)
- Ailefroide voie des Plaques (5.5)
- 4 faces à la Meije (Z 5.4/Gravelotte 5.4-5.5/Corridors 5.3-5.4/Orientale nord 5.3)
Sans compter que le jeune guide l'Ubaye Nicolas Jean a aussi "sévi" dans sa vallée tout au long de l'hiver, parfois en compagnie du très discret Julien Savy : au moins une douzaine d'ouvertures dans le 5 et autant de répétitions. Quelle saison !!!!
Quatre couloirs à la Meije, le dernier enchaînement signé Benjamin Védrines et Nicolas Jean
Benjamin Védrines et Nicolas Jean ont encore fait des leurs ! Le 5 juin, ils ont réalisé l'enchaînement de quatre descentes de couloirs en versant nord de la Meije, toujours dans les Écrins : ...
A mes yeux le plus bel enchaînement connu de toute l'histoire du ski de montagne.